Login

Le négoce à la une Péris, un centenaire vert et engagé

Idriss Bigou-Gilles

Du haut de ses cent ans, Péris SAS, à Béziers dans l’Hérault, est une entreprise prospère et innovante. Son activité de négoce d’agrofournitures est tournée vers la protection de l’environnement et le bien-être de ses salariés.Par Florence JacquemoudPhotos : Idriss Bigou-Gilles

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

Il aura fallu attendre la fête du centenaire des établissements Péris, en juillet 2021, pour que Jean-François et Laurent, les actuels dirigeants, apprennent de la bouche de leur père, Jean-Noël, l’histoire vraie de la création de l’entreprise. C’est Antoine, leur arrière-grand-père, qui a démarré une activité de vente de fourrage en 1921, à Murviel-lès-Béziers dans l’Hérault, un village choisi parce qu’il possédait une gare, un détail pratique pour le commerce. « On pensait qu’avec notre arrière-grand-mère, Madeleine, ils avaient été expropriés de leur exploitation de Blagnac, en Haute-Garonne, au moment de la création de l’aéroport, se souvient Jean-François Péris, le PDG. En réalité, notre père a confié qu’ils étaient venus s’installer près de Béziers pour fuir la famille qui leur interdisait de se marier. Notre grand-père, Émile, est d’ailleurs né en 1921, l’année de leur arrivée dans leur nouvelle commune. »

Entré dans l’entreprise en 1947, alors que l’agriculture se développe grâce à la mécanisation et aux produits pétroliers, Émile Péris introduit la distribution de fioul et d’huile. Adepte des expérimentations en tous genres et des nouvelles technologies, il s’intéresse aux engrais et devient concessionnaire du groupe Saint-Gobain dans les années 50.

Déjà quatre générations

Son fils, Jean-Noël, commence, tout jeune, à travailler avec lui et prendra les rênes en 1966, alors que son père s’absente pour un souci de santé. Jean-Noël n’a que 18 ans lorsqu’il s’installe dans le fauteuil de PDG qu’il ne quittera plus. Il profitera de l’expansion de l’activité des châteaux viticoles de la région pour accroître la distribution d’agrofournitures. De son côté, Émile continuera à s’occuper de l’établissement de Murviel-lès-Béziers, spécialisé dans la vente de carburants. Trois mois avant son décès, en 2011, il se rendait encore quotidiennement au bureau.

Laurent et Jean-François, les fils de Jean-Noël, entrent à leur tour dans la SAS Péris en 1990 et 1992 pour accompagner leur père. Il y a dix ans, lorsque celui-ci prend sa retraite, ils se partagent les rôles. Jean-François devient PDG, et Laurent, DG. « Mon frère est davantage axé sur le commerce et les cultures, et je suis plus sédentaire, précise le premier. La répartition s’est faite naturellement pour des raisons pratiques. Mais nous prenons toutes les décisions ensemble. » Les deux frères « travaillent différemment » de leurs prédécesseurs. Ils s’appuient notamment sur le réseau Agrosud, créé en 1988 avec les négoces voisins Omag, Perret et Touchat, pour se doter d’une puissance d’achat d’agrofournitures et être concurrentiels dans leur secteur d’activité. « Agrosud nous a permis de conquérir des marchés, se félicite Jean-François Péris. Aujourd’hui, avec quinze entreprises adhérentes, c’est le premier distributeur sur l’arc méditerranéen et la vallée du Rhône en viticulture, arboriculture, maraîchage et grandes cultures. »

Autre conséquence de ce rapprochement, la SAS Péris est entrée au capital de plusieurs de ses confrères. En 2000, elle a acquis 50 % du capital de Touchat à Mauguio (Hérault), et en possède aujourd’hui la totalité. En 2001, c’est la majorité des parts du négoce Bertrand-Remon, à Luc-sur-Orbieu (Aude), qu’elle a repris, puis, en 2009, une participation dans Aquadoc, spécialiste de l’irrigation. Depuis 2017, elle détient aussi la moitié de la société PCEB, à Carcassonne (Aude), à parts égales avec Jeem, à Meynes (Gard), autre adhérent d’Agrosud. Enfin en 2021, elle a mis la main sur le revendeur de pièces de matériel agricole Lopez pièces agricoles, à Puisserguier (Hérault), qu’elle a rebaptisé Languedoc pièces agricoles (LPA).

En 2019, Péris a par ailleurs créé l’enseigne de matériel viticole Vitizone, avec un premier magasin à Pézenas (Hérault). Un deuxième a ouvert l’été dernier à Capestang (Hérault) et un troisième est en construction au Somail (Aude). La PME possède également seize dépôts d’agrofournitures pour les professionnels, qui disposent pour la plupart d’une boutique Péris grand public. « Visionnaire, notre père avait aussi acheté dans les années 90, avec ses confrères d’Agrosud, le dépôt Seveso 2 d’EDN à Sallèles-d’Aude (Aude) qui stockait les produits phytos de Dupont de Nemours, indique le PDG. Cela nous permet de garder nos fournitures en toute sécurité. Nos différents sites sont d’ailleurs mis à contribution, exceptionnellement cette année, pour surstocker engrais et piquets afin de parer aux éventuelles pénuries et pouvoir livrer nos clients. » Au total, le groupe Péris compte 175 salariés, 12 000 clients, et réalise entre 87 et 90 M€ de chiffre d’affaires par an.

Une démarche environnementale

Péris, cependant, n’est pas qu’un distributeur d’agrofournitures. Depuis de nombreuses années, la PME mène un travail permanent de recherche et de veille pour faire évoluer son activité vers des horizons plus « verts ». Aujourd’hui, 30 % du CA et 60 % des volumes des produits de protection des plantes vendus sont des substances de biocontrôle, dont toutes ont été testées durant trois à quatre ans par la plateforme Agrosud Développement avant d’être commercialisées. Plus de 800 essais ont été réalisés depuis la création de cet outil en 1998, dont 60 % sur des solutions bio et de biocontrôle.

Au moment de la séparation de la vente et du conseil, la SAS Péris a choisi la vente, mais elle avait entrepris de former ses équipes sur les bonnes pratiques agricoles et agroécologiques. Deux nouveaux conseillers ont été embauchés pour accompagner ses clients. « Nous sommes leaders en France des produits destinés à la lutte par confusion sexuelle, détaille le dirigeant. Nous avons recruté une spécialiste, il y a six ans, qui a initié tout le personnel. » « Notre pôle technique, qui comprend cinq personnes, suit notre clientèle dans divers domaines, complète Pierre-Alexis Tijou, délégué technique. Nous réalisons des prélèvements de terre, pétioles et sarments, que nous faisons analyser par deux laboratoires partenaires. Cela nous permet de guider les exploitants dans les travaux à effectuer. Nous avons également développé en interne l’OAD ver de la grappe Per’Observ, qui repose sur un réseau de 180 pièges relevés tous les trois jours par nos techniciens et sur des pièges connectés avec appareils photo qui nous envoient des informations. Couplé à 50 stations météo et aux informations connues sur la biologie des ravageurs, ce dispositif nous permet d’avertir les producteurs sur les pics de vol des insectes. » Le négoce accompagne aussi les exploitations pour obtenir leur Certiphyto et être certifiées HVE. En 2021, 150 ont obtenu ce label. Dans l’Hérault, 22 % des nouvelles certifications HVE passent par Péris.

« Il y a trente ans, j’ai démarré ma carrière avec des produits qui sentaient mauvais à 30 km à la ronde et posaient des problèmes écologiques et de santé, note Jean-François Péris. Aujourd’hui, on a gardé les 20 % des molécules les moins toxiques et aucune ne se retrouve dans les nappes phréatiques. C’est une victoire. Nous sommes passés d’engrais à 80 % chimiques et 20 % organiques, à la proportion inverse. Avec le renouvellement de génération, nos clients sont demandeurs de nouvelles solutions. »

En 2020, Péris est par ailleurs le premier négoce familial de France à avoir été labellisé « engagé RSE niveau confirmé » par l’Afnor. « Il s’agit d’un engagement au quotidien qui est réévalué tous les 18 mois, expose Pierre-Alexis Tijou, en charge du dossier. Nous avons proposé des formations aux salariés pour leur permettre d’évoluer et avons réfléchi à l’amélioration de leur confort sur les sites. Nous avons aussi formalisé les arrivées des nouvelles recrues et beaucoup développé la communication. Sur les aspects environnementaux, nous faisons de gros efforts sur la gestion de nos déchets et des emballages rapportés par nos clients (bidons, sacs d’engrais…) que nous faisons recycler. Nous réalisons des campagnes d’information pour que les exploitants dirigent leurs déchets vers les filières adaptées. » La SAS s’attelle enfin à son bilan carbone, qui implique aussi celui de ses fournisseurs, qu’elle doit motiver dans l’amélioration de leurs pratiques. « Le fait de pouvoir annoncer à leur entourage que l’entreprise est labellisée RSE est très important pour nos salariés, ajoute Jean-François Péris. C’est une vraie fierté, qui participe entièrement au sentiment de bien-être au travail. »

© Idriss Bigou-Gilles - « Nous sommes leaders en France des produits destinés à la lutte par confusion sexuelle, se félicite Jean-François Péris, le PDG du négoce éponyme. Nous avons recruté une spécialiste il y a six ans, qui a initié tout le personnel. »

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement